Portrait Thibaut CHERET (promotion 1999)

1. Pourriez-vous nous en dire plus sur votre parcours ?
J’ai obtenu mon diplôme d’ingénieur de l’EOST et un DEA en 1999. Après un stage de fin d’étude de 10 mois sur l’anisotropie des ondes converties, j’ai commencé ma carrière chez Schlumberger d’abord en recherche puis en opérationnel dans le traitement et l’imagerie sismique. Au centre de recherche à Stavanger, j’ai eu l’opportunité de travailler sur l’intelligence artificielle et publié plusieurs articles.
J’ai ensuite travaillé pour BG Group – racheté depuis par Shell – qui a connu une forte croissance avec des succès importants en exploration au Brésil et à travers le développement du marché du gaz liquéfié. J’ai occupé plusieurs fonctions techniques et managériales dans l’exploration production. Avant le rachat par Shell j’ai rejoint le groupe Nexen, une compagnie canadienne qui venait juste de se faire racheter par CNOOC, une compagnie chinoise. J’étais le responsable du secteur Shetland (… au nord de l’Ecosse « où il y a tellement de vent que les arbres grandissent penchés ») avec un budget exploration conséquent et une responsabilité étendue à l’acquisition de nouveaux champs.
J’ai alors décidé de reprendre mes études et j’ai fait un master en finance à l’Université College London en cours du soir. Mon sujet de master était sur la transition énergétique ce qui m’a amené à collaborer avec mon futur employeur Offshore Energy UK. J’ai rejoint OEUK en tant que responsable de la réduction des émissions à effet de serre. L’année dernière, je suis devenu responsable éolien et renouvelable au sein d’OEUK.
Au long de mon parcours, j’ai travaillé principalement dans trois pays : la Grande Bretagne, La Norvège et l’Egypte. J’ai eu l’occasion de visiter beaucoup de pays mais je n’ai jamais travaillé en France. J’ai eu l’opportunité de rencontrer une grande variété de cultures et faire face à des environnements de travail différents. Du défi de maintenir le courant pendant le printemps arabe en Egypte au sein d’une coentreprise avec l’état égyptien, à la difficulté d’intégration des cultures chinoises et occidentales en passant par les remous du Brexit, j’ai été le témoin parfois contrarié des soubresauts du monde, « tout en gardant un épais accent français ! ». J’ai aussi échappé à une petite dizaine de plan sociaux ce qui met en lumière la cyclicité du secteur énergétique et l’impact croissant de la transition.

2. Pourriez-vous décrire votre poste actuel (ou votre dernier poste et vos dernières fonctions) ?
Je suis le responsable éolien et énergies renouvelables chez OEUK. OEUK est l’association des énergies britanniques en mer. La filière est historiquement centrée sur le pétrolier et le parapétrolier mais se diversifie maintenant sur les nouveaux vecteurs d’énergie comme l’éolien marin, l’hydrogène et ses dérivés, et la capture et la séquestration du CO2. En 2021, notre association a signé un accord cadre avec le gouvernement britannique pour réaliser la transition énergétique en mer du nord. Il est estimé que 60% de la réduction d’émission britannique est lié aux actions en mer du nord (éolien, hydrogène et séquestration de CO2). L’accord a cinq piliers : décarbonation du secteur pétrolier, capture et séquestration du CO2, le développement de la filière hydrogène, la transformation de la chaine d’approvisionnement et le développement des carrières. Je suis responsable de la réalisation du premier pilier à travers la réduction des émissions de méthane, l’électrification des plateformes pétrolières et le développement de diesel vert. Mon rôle est aussi transverse car l’éolien et les énergies renouvelables pourront dans le futur se commercialiser à travers la production d’hydrogène et ses dérivés. Les filières actuelles doivent se transformer pour produire de l’électricité renouvelable et de l’hydrogène. Les employés doivent se reconvertir pour travailler dans ces secteurs et on doit recruter massivement. La Grande Bretagne est très en avance sur l’éolien (2eme marché mondial) et nous travaillons sur l’éolien flottant – la prochaine frontière.
Mon rôle implique d’apprendre très rapidement de nombreux sujets très variés de la création du plan méthane pour la Grande Bretagne à la compréhension du marché de l’électricité et l’implication de sa future réforme pour nos membres, en passant par l’impact de la nouvelle politique fiscal.
Mes journées sont aussi très variées : répondre à une consultation, écrire des rapports et notes techniques, répondre à une annonce politique, être interrogé par des journalistes, organiser des sessions de travail et des conférences avec nos membres et apprendre sur tout ce qui se passe dans la transition énergétique.
Mon rôle est à la fois technique et relationnel. J’ai découvert le monde des médias, des politiques et leurs travers. J’explique souvent mon travail comme un travail de traduction entre le politique et l’ingénieur. « L’ingénieur se base sur les faits, le politique sur le ressenti ».

3. Auriez-vous une anecdote à nous partager sur votre séjour à l’EOST ?
Je me souviens d’une nuit blanche arrosée qui avait directement été suivie par 4h de géodynamique de la terre par le professeur Legros. Le professeur Legros pouvait étaler la même équation sur deux tableaux verticalement agencés par un astucieux système de poulies. A mon grand étonnement, le cours fut beaucoup plus facile à suivre. Néanmoins, je déconseille fortement cette méthode aux futures générations.

4. Quelles sont vos attentes vis-à-vis de Géophyse ?
Les anciens et les futurs diplômés de l’EOST forment une communauté répartie dans le monde entier. J’attends de Geophyse de faire le lien au sein de cette communauté mais aussi de faire profiter les étudiants de l’expérience de cette communauté à la fois sur les métiers mais aussi sur son exceptionnel aspect multiculturel. C’est l’opportunité d’offrir aux futurs diplômés une grande ouverture sur le monde.